est-ce qu’on peut raisonner deux minutes ?

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Ce sont parfois de profondes détresses qui s’expriment dans les émissions radiophoniques. Ainsi, mardi dernier (3 avril 2017), Sud-Radio ouvrait son micro à une dame qui se trouve dans une grande souffrance affective (elle se rappelait avec délice les temps anciens ou elle se faisait siffler), financière et morale ((« Jusqu’où devrait-on pratiquer une sélection ? En quoi l’économie est-elle “morale”? »)).

2/
Faisant preuve de résilience, elle avait trouvé deux réconforts, le premier dans l’évocation récurrente d’un fantasme, à savoir l’explosion du PS, dont l’énoncé la rapproche systématiquement de l’epectase, le second dans son adhésion à une association qui réconforte ses membres par l’ardente défense d’une valeur essentielle : l’éthique.

3/
Un bonheur n’arrivant jamais seul, les élections qui se profilent à l’horizon ont permis d’envisager à la fois la fin du PS et l’émergence d’un candidat chantre de l’éthique et mettant la barre très haut : on doit être irréprochable, et même une simple mise en examen est rédhibitoire. « Il y a un pb d’abaissement du niveau éthique dans la vie politique ». ça tombe bien, lui n’a jamais eu un seul manquement à cet impératif absolu.
Donc bien sûr  ce sera Fillon. Hurlement des journalistes (des bobos parisiens, m’as coumprès)

- oui, il est mis en examen ! pour détournement de fonds publics ! complicité et recel de détournement de fonds publics !! recel et complicité d’abus de biens sociaux !!! et manquement aux obligations de déclaration à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique !!!! et sa femme, idem !!!!! et ses enfants !!!!!! et son suppléant !!!!!!!!
- Hola, présomption d’innocence ( … hum), cabinet noir, complot !
- Soit, mais vous ne nierez pas ces points :
il se cramponne à ses mensonges : les dates, les costumes (vidéo 4), les compétences, … n’acceptant de revenir sur ses déclarations que face à des preuves incontestables
il est malhonnête
il est parjure - la trahison de sa promesse /
Est-ce éthique, tout ça ?

Et c’est là que la dame (se) lance un défi insensé :
- Est-ce qu’on peut raisonner deux minutes?
Ce qui paraît un objectif fou au vu de sa capacité argumentative défaillante, on va essayer de l’aider.

4/
L’éthique, kes-aco ? Vladimir Jankélévitch paraît le plus à même d’éclaircir la question lorsqu’il écrit que c’est une question de droit : Le risque inhérent à toute situation concrète fait de la responsabilité éthico-métaphysique une responsabilité juridiquement imputable(Je-ne-sais-quoi, 1957, p. 255)
Donc, si quelqu’un vous parle d’éthique, cherchez les avocats, ils ne sont jamais très loin. En l’espèce, ils sont venus d’eux-même devant les caméras reconnaître la faute. Oui, il y a bien eu double emploi, et alors ? non la progéniture n’était pas avocate, et alors ? de fait elle n’a jamais donné l’impression de travailler, et alors ? oui les fringues ont été offertes, et alors ? Etc.
Les journalistes font un dernier essai :
- Oui mais le gars, il dépense tout ce qu’il gagne.
- Eh ben ? L’éthique, c’est chic, l’éthique ça claque.

5/
… Y a un pb, quand même : le fifi, il craque plus que ce qu’il gagne (à la sueur de nos impôts), … et il peut pas payer les siens ! Et ça, c’est pas bien.
Petite incise : de façon idéale, en plus d’un avocat le gars éthique se paye un fiscaliste. Et lui, « Moi président exemplaire » il aura un fiscaliste, faudra recycler tout ça. En attendant, faut qu’il paye ses impôts.
D’abord, il essore son fils. Les avocats, c’est à vous. “François Fillon payait à son fils une partie de son loyer et de son argent de poche, à partir du moment où il a gagné sa vie, il était normal qu’il le rembourse”. Ben ouais, c’est normal. Tous les parents font ça. Il n’avait pas pu lui payer ses études, ok, coco tu sais combien il coûte mon train de vie ? et maintenant tu me rends le pognon que je te filais quand t’étais étudiant.
Puis sa fille, les parents boivent, les enfants trinquent, éthique et toc. Bon, une fois, elle veut bien, “ok, je te rembourse le mariage, ah ouais, t’as gardé les factures, cool, et il t’en faut encore ! combien ? 30 000 ! putain… ça ira pour cette fois-ci, mais n’y reviens plus ».
Aïe ! qui va payer le reste de ma dette ?
7/
Eh ben, y a les sans-dents. Il va voir les aides-soignantes, il leur explique, il a une grosse dette sur le dos, et il n’ait pas question d’envisager quoique ce soit avant de la régler mais elles paraissent pas convaincues, ces fainéantes, ce ramassis de syndicalistes jamais contentes.
Compliqué… Et là, l’idée de génie. Ses communicants se pointent, hé, on fait le coup de De Gaulle. C’est quoi ça ? “les français sont dévots” (Oui, ils l’ont pas lu, au prix où ils les payent, il n’a que des stagiaires, donc ils z’ont entendus “dévots”.) Il est emballé ! Ok, je prends, au point où j’en suis… tiens, ça , c’est le tel de Farjot, tu l’appelles, tu lui commandes une Manif pour tous ( tu diras qu’on est 200 000. Sur une place qui contient 40 000 ? Oh, fais pas chier !) … ah, et quelques messes. La facture ? Elle a qu’à se payer sur les quêtes. Ou elle la file à Copé.
Bon, y a eu un bug à la Réunion, l’autre abruti de curé il te sort pas l’Évangile du jour sur les mecs qui mettent cocus les autres. C’est saignant : « «Que le juge ne te livre à l’officier de justice, et que tu ne sois mis en prison. Je te le dis en vérité, tu ne sortiras pas avant d’avoir payé jusqu’au dernier sou !» », bon, serrons les fesses, ça devrait passer, ces crétins avec leur laïcité ils devraient pas trop en faire là-dessus.
Et il a raison, ça passe., la chute s’enraye, il remonte ! Et là, c’est un boulevard qui s’ouvre devant lui, il se prend à concurrencer la Le Pen, il a compris, tout est permis., il lâche le morceau : Oui, je suis malhonnête, et le premier qui m’insulte en mettant en doute ma malhonnêteté, je lui fous un procès au cul.
On le tient, notre candidat éthique, les choses sont maintenant claires, on se la refait tellement elle est bonne

8/
Et maintenant, mes compagnons, allons porter la Bonne Nouvelle, mettons le collaborateur au Château ! Elle était pessimiste, la petite dame, c’est pas deux minutes mais encore quelques heures qu’il reste pour raisonner et convertir les français ! Le programme ? Il est simple, Fifi président, c’est les juges aux chiottes, et les manifs pour tous !!! Tous les jours, tout le monde dans la rue. 365 jours par an, pendant 5 ans ! Pour prendre le pouvoir là où il se trouve. Dans le caniveau.